Vendredi a eu lieu mon RDV du 4ème mois.
Mon col est nickel. Les battements cardiaques de la graine sont à 150. Tout est parfait.
Sinon, je parle de mon envie de don de sang de cordon. Je sais que le CHU où je suis suivie, n’est pas collecteur, sauf cas particulier. Forcement nous sommes LE cas particulier. J’évoque alors à Dame Gygy, de faire un don anonyme, sans intérêt personnel en jeu. En effet, Raphaël a déjà récolté 4 greffons personnels. Dur, dur de lui faire comprendre…
Car elle me dit : oui entre frère, l’allogreffe se fait régulièrement.
Heu ? Je dois comprendre que la graine a un pénis ????
Un peu à l’ouest, je ne lui ai pas demandé ! Tellement omnibullée à vouloir lui faire comprendre ma démarche. Pour au final, devoir faire la demande à l’oncologue de crapaud. Si cette dernière est d’accord, Mme Gygy me suit dans mon projet… Va comprendre !
Sinon, nous attendons une place pour le commencement de l’intensification par autogreffe de crapaud. D’ici la fin de la semaine voir début de la semaine prochaine, Raphaël partira 3 semaines dans une cabane. Cette cabane est une chambre stérile, qui ressemble à celles des enfants bulles. Mon crapaud devra rester 3 semaines dans son lit, sans toucher le sol. Lorsque je serai avec lui dans la cabane (une personne maxi avec lui), je devrai être habillée des pieds à la tête en schtroumph… Avec le bidon qui grossi, ça va être sympa leur combi…
Pour résumer, les soins, qu’il va recevoir, sont une chimio ultra-intensive qui va lui griller les cellules souches de moelle épinière bonnes comme mauvaises. Ensuite, ils lui réinjectent son greffon récolté à Rennes, pour lui redonner ses propres cellules souches saines qui retrouveront leur place initiale.
Niveau moral, j’observe les pâquerettes. Je vis un mélange entre le ras le bol, l’injustice, le mal-être et l’impossibilité de montrer à mes proches mes sentiments négatifs.
En effet, j’ai parfois l’envie de tout envoyer balader. De m’appesantir sur mon malheur et de dire stop, je prends le temps de pleurer sur mon sort. Mais, je ne peux pas.
Raphaël lui ne pleure pas sur son mal-être.
Non, il me fait vivre son mal, en me hurlant dessus. En m’envoyant ses ressentiments sur cette maladie qui lui pourrit la vie. Je suis sa soupape. Il est capable de me faire un scandale d’une telle violence, à n’importe quel moment de la journée et en n’importe quel lieu, juste parce qu’il ne supporte plus aucune frustration.
Et comment ne pas le comprendre ? On lui a tout enlevé. Alors, si moi je perds pied, qui lui servira de dérivatif ?
Imaginez une punition comme un moment d’isolement dans sa chambre le met en « trans », avec des supplications pour ne pas rester seul. Il s’accroche à moi, aux encadrements de porte comme si la faucheuse l’attendait, dès que nous serons séparés.
Quel esseulement, ce genre de situation…
Comment lui faire comprendre les limites tout en restant empathique et garder pieds ?
Dans ce genre de situation, je suis autant en colère que lui. Car, moi aussi, je trouve ça injuste ! Mon bébé a à peine 3 ans1/2! Merde ! Ce n’est pas un âge pour vivre ça !
Le voir à bout, en détresse psychique, face à cette vie qui lui renvoie tant d’injustice, me mine.
Et cette violence… Toute cette violence qu’il a en lui…
Ces difficultés à exprimer son mal-être. Toute cette intériorisation qui explose d’un coup de manière physique.
Il sait que c’est cette saloperie qui le mange, mais il n’a que moi en face de lui.
Je sais qu’il regrette ses coups et ses états de mal. Malgré cette repentance, lorsqu’il est dans cet état, il lui est difficile de prendre les portes de sorties que je lui donne.
Actuellement, je suis à 17 semaines de grossesse. Mais dans 2 à 3 mois, pourrais-je encore le maîtriser, pour canaliser tout ce déchaînement de colère ?
D’un point de vue plus personnel, j’ai également envie de crier que non, cette grossesse ne peut pas être la dernière.
Que cette maladie m’a en quelque sorte volée ce bonheur et que j’ai envie de normalité.
J’en ai marre qu’à chaque consultation Gygy, on me demande si je veux consulter la psy spécialisée du service.
J’en ai marre qu’on me parle de la maladie de crapaud à chaque consult’.
J’en ai marre des genres de réflexion, vous êtes tombée enceinte avant ou après la découverte de sa maladie.
J’en ai marre lorsque je parle de don de sang de cordon, cela ne peut pas être un geste dépourvu d’intérêt comme la majorité des donneurs.
J’en ai marre que cette maladie soit présente chaque jour dans nos vies et qu’on ne puisse pas faire autrement que d’en parler !
J’EN AI MARRE !