Naître inc.
Marie-Claude Lortie
La Presse
Ça coûte super cher au réseau de la santé. C'est risqué. Très souvent, ce n'est pas nécessaire ou du moins évitable.
Alors pourquoi est-ce que plus d'un bébé sur quatre naît par césarienne au Canada, tandis qu'aux États-Unis, c'est un sur trois? Et que les chiffres ne cessent de grimper.
«Il va falloir que quelqu'un fasse acte d'autorité pour que l'augmentation cesse», dit un des obstétriciens interviewés dans le documentaire The Business of Being Born. «Parce que sinon, ce sera 100% des naissances.»
Si vous êtes enceinte et que vous comprenez l'anglais, courez ce soir à 18h à l'Université Concordia, où est projeté ce documentaire produit par l'actrice et animatrice de télé américaine Ricki Lake et réalisé par Abby Epstein.
Sorti aux États-Unis au début de l'année, ce film dont tout le monde parle - la revue de presse va du New York Times à People, en passant par Larry King Live, Mothering et Bust - n'est pas anti-médecin. Ni anti-hôpital, ni anti-césarienne. D'ailleurs, une des mères enceintes que suit ce documentaire sur la naissance devra en subir une et sera envoyée à l'hôpital par sa sage-femme spécialisée en naissances à la maison. Et de très nombreux médecins y sont interviewés pour y exprimer des points de vue, tout sauf manichéens sur la question.
Ce que le film fait, c'est plutôt poser des questions cruciales que plus personne ne semble vouloir poser, sur la dérive de l'industrie de l'accouchement. Une industrie qui produit les taux de césarienne actuels, qui encourage l'intervention médicale et décourage l'exploration des autres options, comme s'il n'y avait qu'une seule vérité et que tout le reste n'était qu'une affaire de hippies granos irresponsables.
Ce que le film fait, c'est dire aux femmes: «Allô! faites les choix que vous voulez, mais au moins, informez-vous un peu avant de plonger.»
«Les gens prennent plus de temps à magasiner leurs voitures et leurs télés que les options de naissance qui s'offrent à eux», y dit une intervenante, qui s'inquiète de voir les parturientes marcher comme des somnambules vers les hôpitaux. Situation d'autant plus absurde, ajoute le célèbre médecin Michel Odent, pionnier des programmes de naissances démédicalisés en France, «que dans le cas de l'accouchement, c'est clair que l'option la moins chère est la meilleure».
Le film ne cherche pas à culpabiliser les femmes qui choisissent d'accoucher à l'hôpital, il cherche plutôt à montrer qu'on ne les informe pas bien. Et que l'information qui est fournie à la population tend plutôt à montrer l'accouchement comme une catastrophe potentielle qu'il faut prévenir à tout prix. Et que seul cet aspect «possible catastrophe», bien que statistiquement minime, mérite notre attention.
Évidemment, le film parle de l'impact des vedettes qui ont eu des césariennes et présente cette option comme une solution à la fois glamour et anodine, comme l'ex-Spice Girls Victoria Beckham, qui a planifié ses accouchements chirurgicaux en fonction de l'horaire de soccer de son mari.
On parle aussi de ces femmes qui s'imaginent qu'en ayant une césarienne, elles verront leur ventre du même coup parfaitement reconstruit chirurgicalement.
Le film présente un aspect de l'accouchement dont les médecins parlent peu et qu'on a souvent tendance à rejeter d'un revers de main parce que trop ésotérique: la force émotive de l'accouchement naturel et son impact sur la relation que la mère développe ensuite avec son bébé. «Lorsque des singes donnent naissance par césarienne, ils abandonnent leur bébé, dit le Dr Odent. Ils oublient de s'en occuper.»
On sait tous que ce n'est pas le cas chez les humains.
Mais sait-on comment se sortir de l'ornière médicale qui peut nous mener, pas nécessairement pour les bonnes raisons, vers cette intervention?
Si vous voulez discuter de tout cela, la projection de ce soir sera suivie d'une table ronde avec, notamment, la sage-femme Isabelle Brabant, ainsi qu'une omnipraticienne, une obstétricienne, une infirmière clinicienne et une accompagnatrice à la naissance.
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Pour voir la bande-annonce du film, visitez le www.thebusinessofbeingborn.com
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