Nous connaissions ta date de naissance depuis plusieurs semaines déjà et c'était l'excitation à la maison tout au long du mois d'aout.
La date ultime arrive enfin. Tu naitras la semaine de la rentrée! Tes soeurs reprennent le chemin de l'école. Valentine passe en 5ème et Colleen au cp. Cette semaine sera passée si vite que je réalise que le jeudi 3 septembre, ce sont nos dernières heures à 4. Bientôt nous serons 5... comme les 5 doigts de la main. Nous annonçons la veille à Colleen que demain, c'est le grand jour. Nous ne voulions pas qu'elle en parle à l'école et que ta naissance avant même qu'elle ait lieu se répande comme une trainée de poudre.
Le vendredi 4 je suis attendue à la maternité pour 8h30. Alors nous partons tous les 4 pour déposer ta grande sœur au collège à 8h... puis vient mon tour... papa me laisse aller dans le service... Il me rejoindra après qu'il ait emmené Colleen à l'école pour 9h. Il n'y a pas d'urgence puisque la césarienne est programmée pour 13h.
On m'installe dans ma chambre, dans notre chambre mon petit chaton. La 121 au bout du couloir. Je reconnais la sage femme qui nous a accompagné dans la douleur l'année d'avant. Je lui demande si c'est bien elle. Elle me répond d'un oui un peu gêné. Elle est heureuse pour nous. Elle me dit qu'elle sera au bloc car le chef de service souhaite que les sages femmes se forment à assister aux césariennes pour faire face aux urgences quand une césarienne est décidée à la dernière minute et qu'il n'y a pas d'infirmière de bloc disponible. Je me sens excitée et un peu angoissée. J'ai peur de mourir... De laisser 3 orphelins! Du grand n'importe quoi traverse mon esprit! Ouf papa arrive pour calmer toutes mes pensées. Papa profite de ces longues heures d'attente pour préparer quelques cours et je l'aide à écrire le noms de ses élèves dans son cahier de notes! C'est un peu notre rituel annuel ce truc là!

A 11h, la sage femme "Nathalie" me demande de refaire une douche bétadinée. En parfaite élève, je me laverai 4 fois avec ce truc iodé. Trop peur de choper de nouveau une maladie nosocomiale.

A 11h30, on me pose la sonde. C'est la 1ère fois que je serai gênée quelques heures avec cette sonde. On me pose les perfusions et je patiente.

12h45, Ca y est, tout le personnel s'agite autour de moi. On vient me chercher dans ma chambre. Comme dans les films, je fixe les néons du plafond qui défile. On traverse des portes et l'atmosphère se refroidit. Je suis au bloc! 8 personnes sont là pour nous... C'est presque flippant... toutes ces questions sur mon identité, mes antécédents... Je réponds, je me répète parfois. Et voilà l'anesthésiste qui apparait. Un chouette monsieur qui me félicitera maintes fois pour mon magnifique dos rond ;-). Tiens j'aperçois monsieur le gynéco. Un monsieur bourru, que j'n'apprécies pas particulièrement pour son manque d'humanité et de considération. Mais pour rien au monde, je ne voudrais quelqu'un d'autres que lui pour la césarienne. Je lui reconnais son expertise et son expérience. J'ai une grande confiance en ses gestes.

13h, ton papa est prêt dans sa tenue de schtroumpf. Il est sans doute moins impressionné car c'est la 2ème fois qu'il y assiste. Mais l'émotion demeure et reste intact.

13h11, on entend le gynéco dire "bistouri". J'ai peur de sentir! ouf!!! l'anesthésie fonctionne.
Ton papa m'avouera avoir eu peur avec tout ce sang par terre. Les chaussures du chirurgien en seront badigeonnées.
Le gynéco utilisera la ventouse pour te sortir de ton nid douillet. Décidément, je porte mes bébés très haut. J'entendrai de nouveau pour ta naissance que je ne veux pas laisser sortir mes bébés. Suis-je possessive à ce point? J'n'en ai pas l'impression. Vous êtes mes petits poussins mais je sais qu'un jour vous volerez de vos propres ailes. Je serai toujours là pour vous mais votre vie future vous appartient.

13h19... ton heure.... notre heure... celle où ta voix nous fait écho! L'émotion est à son comble. Nous réalisons que tu es enfin près de nous. La vie est avec nous par ce cri si intense qui rassure à la minute où il résonne! Nous découvrons que tu es un garçon. Nous sommes heureux. Ton visage contre le mien fera taire ton 1er cri. Tu reconnais ma voix. Tu es si beau. Tel un ange avec ton vernix.

Tu pars avec papa. Il te suit d'un pas décidé à ne rien rater de ta venue au monde. Tu reconnais la voix de ton papa puisque tu t'apaises à l'instant où tu te blottis contre lui. Vous faites connaissance pendant que maman se bagarre avec son nez. Je ne cesserai durant 2 heures de me chatouiller le nez. Un effet indésirable de la rachi-morphine.

16h50... Je te retrouve enfin. Mon dieu, que c'est long cette séparation. Je ne suis pas en grande forme avec mes vomissements incessants. Je ne peux à peine parler tellement les vomissements sont violents. Normal, mon estomac est vide. Ca se calmera vers 3h du matin. Ca ne m'empêchera pas m'occuper de toi et de flipper comme une folle quand je te vois t'étouffer dans tes glaires! C'est là, que je prend conscience de tout l'Amour que j'ai pour toi. Je m'inquiète déjà autant pour toi que pour tes sœurs. Nous passons notre 1ère nuit en tête à tête mon petit cœur. Bonne nuit mon chaton. A demain.